Il avait bravé les plus durs combats… Ses membres blessés, son poitrail jonché de coupures, et son armure en lambeau… mais la plus vilaine des estafilades étaient celle qu’il avait au cœur.
Jeune protecteur d’Arawn croyant encore à la victoire contre les envahisseurs démonistes, il s’en allait pourfendre succubes et autres cauchemars dans les profondeurs albionnaises ; ces exploits – qui s’avèrent aujourd’hui bien pâle face aux horreurs que l’on voit – lui donnaient du courage… de la témérité plutôt…
Un soir alors qu’il partait repousser les serviteurs du mal, la plus vile des blessures lui fut infligées ; celle dont on ne guérit jamais, celle qui meurtrit au plus profond de l’être… Il combattait vaillamment une abomination lorsque survint l’incroyable… Cet être répugnant et dégoulinant de cruauté appela à la rescousse un monstre des plus terrifiants : un béhémoth survint et chargea vers le brave mais trop jeune fléau. Il se défendit longtemps, priant sans cesse son guide divin de lui prêter mains fortes en cet instant…
« Arawn, je t’en supplie ! Que ta grandeur m’aide à repousser ces viles créatures ! »
Il n’en fut rien durant de longues minutes… trop longues minutes… il rageait autant que la douleur envahissait son corps au plus profond de sa chair…
« Ne t’ai-je pas suffisamment servi ?! Toutes ces années consacrées à ta sauvegarde et à ta grandeur ne méritent-elles pas un geste de ta part ?! Arawn ! Pourquoi me laisses-tu endurer ces maux ?! »
Le combat dura un long temps qui semblait pour le jeune sarrasin une éternité… Il se rappela tout ce qui lui avait été appris tant par ses maîtres instructeurs que par ses proches… Après avoir enduré les pires souffrances, il finit par vaincre… son corps meurtri, son armure en piteux état, son cœur déchiré…
Le genoux à terre, larmoyant par la déception d’avoir été abandonné par son dieu, laissant ses estafilades répandre le liquide rougeâtre, il voulait déposer les armes, quand soudain il entendit une voix douce et une plus rauque le sermonner vigoureusement :
« Lève-toi ! Que fais-tu joncher sur le sol ?! N’as-tu pas honte ?! »
Il releva la tête et vit deux silhouettes se dessiner malgré ses yeux emplis de larmes : robuste et à l’allure fière, se dressait face à lui un mercenaire au regard froid ; discrète mais empli de passion, se tenait à ses côtés une disciple de l’église qui déjà commençait à penser ses blessures…
« Qui sont-ils ? Que me veulent-ils ? »